Jean-Claude Forest
est né en 1930. Il réalise sa première bande dessinée alors qu'il est
encore à l'école des Métiers d'Arts: "La Flèche Noire" d'après
Stevenson. Il a 19 ans.
Durant la période 1950-1960, sa production s'adresse
essentiellement à la jeunesse. Il collabore au journal Vaillant avec deux
séries: "Pour la Horde" et "Le Copyright", aux périodiques
édités par Marijac – dont il illustre les scénarios, et aux éditions
Offenstadt en réalisant de très nombreux fascicules des aventures de
Charlot. Pour ce même éditeur, il reprend également le personnage de Bicot,
jadis créé par l'américain Braner. Mais découragé par l'insidieuse censure qui
pèse alors sur la bande dessinée et réprime tout particulièrement l'imaginaire,
il se tourne vers l'illustration, plus spécialement dans le domaine de la
science-fiction.
Le revue Fiction lui offre le support de ses couvertures de
1956 à 1964, et les éditions Hachette l'illustration de la plupart des
titres du Rayon Fantastique de 1959 à 1964.
Dans le même temps, il collabore au Livre de Poche pour une trentaine de
volumes.
Bien qu'à partir de 1959, il illustre dans France-Soir les adaptations de
romans découpés en strips quotidiens, il ne se réconcilie vraiment avec la
bande dessinée qu'en créant "pour s'amuser" le personnage de Barbarella.
V. Magazine, 1962.
Cependant que l'éditeur des surréalistes, Eric Losfeld
s'apprête à réunir en un volume – luxueux pour l'époque – les huit premiers
épisodes de "Barbarella", Forest participe aux côtés de Francis Lacassin et
d'Alain Resnais à la création du Club des Bandes Dessinées.
En 1964, il partage avec Rémo Forlani, la rédaction du journal
Chouchou, un hebdomadaire de bandes dessinées grand format, édité par
Filipacchi. Il en profite pour créer "Bébé Cyanure", une BD qui
annonce "Hypocrite", et écrit pour Paul Gillon les premières pages
des "Naufragés du Temps" sous le pseudonyme de J. Valherbe.
Après avoir produit un photo-roman pour Plexus (Les Magiciennes), et
tandis que les droits cinématographiques de Barbarella sont achetés par le
producteur Dino de Laurentiis (Jane Fonda sera Barbarella et Vadim réalisera
le film), Forest écrit, dessine et co-réalise pour l'émission TV, Dim Dam Dom,
"Marie Mathématique". C'est une comédie musicale en papier découpé
animé. Gainsbourg chante les lyriques dont il a écrit la musique sur des
paroles d'André Ruellan.
Vadim réalise Barbarella à Rome. Forest dessine la plupart des décors. Le film
sort en juin 1968. Depuis sa parution, Barbarella (la bande dessinée)
a été fréquemment traduite et publiée dans un grand nombre de pays. Mais en
France, l'album est rapidement tombé sous le coup de la censure, interdit à
l'affichage, à la publicité et à la vente aux mineurs. Néanmoins, le second
volume, "Les colères du mange-minutes", sort chez Kesselring
en 1974. Dessiné depuis 68, il a été pré-publié simultanément dans V. Magazine
et Linus, en Italie. "Conque" pour Pif, "Mystérieuse matin, midi et soir",
très libre adaptation de "L'Ile mystérieuse" de Jules Verne, sera sanctionnée
pour "imagination excessive", le troisième volet ne paraîtra pas dans
l'hebdomadaire communiste... Heureusement, l'intégralité de la bande sera
publiée dans Linus en Italie, puis en France aux éditions Serg.
Dargaud en sortira plus tard une version couleur.
Refroidi par les mésaventures de cette bande dessinée à
laquelle il était très attaché – c'était sa première création après
Barbarella – Forest accepte avec enthousiasme la proposition que lui fait
la télévision (l'ex-ORTF) : écrire et réaliser une dramatique de science-
fiction. Ce sera "Les poules bleues de l'automne". Le film est tourné
dans la Creuse et passe à l'antenne le 31 décembre 1974. Cependant, Forest
demeure fidèle à la bande dessinée. Il publie dans France-Soir les aventures
d'une nouvelle héroïne: "Hypocrite" – série qui se poursuivra un
moment dans les pages de Pilote. "Barbarella", réhabilitée, paraît en
Livre de Poche, et "Les Naufragés du temps" renaissent de leurs
cendres et trouvent une suite dans France-Soir et en album chez Hachette.
Heureuse collaboration entre Forest et Gillon qui portera sur quatre volumes.
Peu après, Pierre Horay édite le troisième "Barbarella – Le semble-lune"
– et du même auteur un recueil de récits complets et de poèmes illustrés: "Tiroirs
de poche".
En 1978, les éditions Casterman créent (A
Suivre). Pour Forest comme pour beaucoup d'autres, ce journal semble
être le support idéal. Dès le premier numéro il s'y manifeste par la production
simultanée de deux histoires: "Ici même" avec Tardi, et une très libre
adaptation du "Roman de Renart", avec Max Cabanes. L'année suivante il
écrit, et cette fois dessine "La jonque fantôme vue de l'orchestre" et
un peu plus tard, en 1984, "Enfants c'est l'hydragon qui passe". Il
publie aussi, toujours chez Casterman, un court roman: "Lilia entre
l'air et l'eau". Enfin il propose à Daniel Billon de dessiner le quatrième
"Barbarella: Le miroir aux tempêtes" qui paraîtra dans L'Echo des
Savanes puis chez Albin Michel.
En marge de cette production on peut citer un portfolio
érotique (suite de dessins au pastel) co-édité par Futuropolis/Kesselring
: "Louise Rose ou les comptoirs d'Eros"
et un autre dont les sérigraphies accompagnent des textes inédits de Max
Jacob: "Elucubration"
aux éditions Baby Lone.
De 1984 à 1988, Forest assume la responsabilité du cahier BD dans le mensuel
Okapi. Avec Savard, il crée pour cette revue le personnage du
détective-chasseur de spectres Léonid Beaudragon. Trois albums paraîtront: "Le
fantôme du Mandchou fou", "La nuit des Totems" et "Le Scaphandrier du lundi"
aux Humanoïdes Associés.
Aujourd'hui, avec la complicité d'Alain
Bignon pour le dessin, il publie "Il faut y
croire pour le voir" (les aventures de Narcisse Mulot), cent pages à
paraître en janvier 1996 chez Dargaud éditeur.
En 1984, Jean Claude Forest a reçu le Grand Prix de la ville
d'Angoulême pour l'ensemble de son oeuvre.
De 1976 à 1985, il est envoyé par le ministère des Affaires Etrangères, seul
ou en compagnie d'autres auteurs, à Budapest, Alger, Constantine, Nairobi,
Séoul, Tokyo, Lisbonne, Berlin-Est, afin d'y représenter la bande dessinée
d'expression française.
Jean-Claude Forest est décédé le 29 décembre 1998.